CLAP DE FIN POUR JEAN-MICHEL AULAS À LA TÊTE DE L’OL

Dans le monde des affaires avec CEGID comme dans celui du football avec l’OL, Jean-Michel Aulas n’est pas homme à laisser indifférent ses interlocuteurs. Là où Bernard Tapie s’était fait une réputation de repreneur d’entreprises en difficultés, le Rhodanien jouit d’une image de bâtisseur. Parti de rien, il a fait de CEGID une référence dans le monde de l’informatique de gestion d’entreprises : 791 millions d’euros de chiffre d’affaires pour 4400 collaborateurs. Sur le même principe, il racheta l’Olympique Lyonnais en 1987, club qui évoluait alors en Division 2 et qui ne disposait que de 4 collaborateurs en dehors du secteur sportif. 35 ans plus tard, l’OL Groupe compte plus de 500 employés et pouvant générer un chiffre d’affaires de plus de 300 millions d’euros lors de saisons européennes.

Par bien des aspects, le parcours de Jean Michel Aulas pourrait servir de synopsis d’une mini-série Netflix.

Épisode 1 : l’apprentissage. À peine 2 ans après son rachat, l’OL version Aulas décrocha son premier titre national : champion de France de Division 2 – 1989. Très vite, il découvrit l’Europe dès la saison 91/92. Très vite, il a fait le constat que participer à une compétition européenne n’est pas sans impact sur le championnat en terminant à la 16e place la même année. Très vite surtout, il comprit que son ambition européenne serait corrélée à sa capacité à développer le chiffre d’affaires du club.

Épisode 2 : le temps des succès. Sur le plan sportif, il a su profiter de l’irrégularité et de problèmes managériaux du PSG version Canal+ et de l’OM version Robert Louis-Dreyfus, pour installer son OL en haut de la hiérarchie du football national. 7 titres consécutifs de Ligue 1, 6 Trophées des Champions, 2 Coupes de France, 1 Coupe de la Ligue, un centre de formation « fournisseur » de talents. Sur le plan commercial, il enclencha une politique de diversification en créant 4 filiales (OL Voyages, OL Restauration en joint-venture avec Sodexo, OL Argenson Restaurant en partenariat avec Paul Bocuse, et OL Merchandising) et des licences pour des activités comme un salon de coiffure, une auto-école, un bar, un magasin de disques, un limonadier et une compagnie de taxis. Sur le plan institutionnel, Jean-Michel est alors devenu l’homme sans qui aucune décision à la FFF ou à la LFP ne pouvait se prendre. Il a su mettre au profit de son club, ce pouvoir d’influence et peser de tout son poids dans les négociations de droits TV et leurs répartitions.

Épisode 3 : dans la cour des grands d’Europe. Fondé en 2000, le G14 était une organisation regroupant initialement les 14 clubs les plus puissants. Dès 2002, l’OL devint un membre actif de cette structure de lobbying. 2007 restera le « climax » de Jean-Michel Aulas avec son élection à la présidence de ce G14, un titre de champion de France chez les hommes et les femmes, sans oublier l’introduction en bourse de l’OL Groupe. En levant 90 millions d’euros pour 30% du capital, cette étape fut déterminante dans l’optique de financer (en partie) son stade, le Groupama Stadium.

Épisode 4 : miser plus pour gagner moins. Dès 2008, le pari du football féminin fut gagnant (8 ligues des championnes, 13 titres consécutifs de D1), on ne peut pas en dire autant de l’expérience managériale avec Claude Puel. En revanche, le recrutement de Yoann Gourcuff (22 millions d’euros) symbolise une fin de cycle. Pire, le rachat du PSG par le QSI éloignera les Lyonnais des premiers rôles, au moins sur le plan économique. Effet de spirale négative, le projet « stade » a longtemps été retardé par de trop nombreuses procédures obligeant le club à se séparer de certains joueurs clés pour compenser un manque de recettes. Ce sont des Gones affaiblis qui ont élu résidence dans le Groupama Stadium, dans l’incapacité de tenir leur rang de prétendant au titre national.

Épisode 5 : le chant du cygne. 2020 sera l’ultime cycle, celui du déclin puis du passage de témoin. La décision du Premier Ministre de mettre un terme à la saison 2019/2020 à cause du COVID aura été lourde de conséquence pour le modèle Aulas. Au soir de la 28e journée, l’OL était 7e, à 1 point d’une qualification européenne. Preuve de sa perte d’influence, les multiples interventions au niveau de la Ligue, la Fédération ou même des politiques, rien n’y fera. Son Olympique Lyonnais n’obtiendra pas de 24e billet UEFA. S’en est suivi un décalage entre le coût d’un effectif taillé pour l’Europe et des revenus pour couvrir seulement des compétitions nationales. Concours de circonstance ou loi des séries, c’est le moment qu’ont décidé conjointement le Groupe Pathé et les Chinois IDG de vendre. Telle la quadrature du cercle, le dirigeant lyonnais va alors chercher un partenaire financier, capable de racheter les parts de ces actionnaires historiques, réinjecter des fonds permettant de renforcer l’équipe (86 millions d’euros d’augmentation de capital), tout en lui laissant le contrôle du club. Face aux difficultés de boucler son tour de table, John Textor est devenu officiellement en décembre dernier, le propriétaire du club. Face aux contreperformances du moment, l’Américain a donc opté de payer 10 millions d’euros pour tourner définitivement la page de la présidence de Mr Aulas, à jamais le meilleur dirigeant du football français de ces 30 dernières années. Plan séquence sur Jean-Michel quittant sa loge au Groupama Stadium …

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