Génération 86 : Les mots et les actes

Le rêve de devenir footballeur professionnel peut être très difficile à réaliser pour beaucoup de jeunes joueurs. Malgré leurs efforts et leur talent, certains ne parviennent jamais à atteindre leur objectif. La compétitivité du monde du football est impitoyable et il y a souvent plus de joueurs talentueux que de places dans les équipes.

Pour ces joueurs, la frustration et la déception peuvent être écrasantes. Ils ont peut-être travaillé dur depuis leur plus jeune âge, passant des heures à s’entraîner, suivant un régime alimentaire strict et sacrifiant souvent leur temps libre et leurs loisirs pour leur passion pour le football. Mais malgré tous ces efforts, le rêve de devenir footballeur professionnel reste inaccessible.

En plus de la concurrence, les jeunes footballeurs peuvent également rencontrer des obstacles financiers et logistiques pour poursuivre leur rêve. Beaucoup de ces joueurs ont des familles aux revenus modestes et ne peuvent pas se permettre les coûts liés à l’entraînement, aux équipements et aux compétitions. Les équipes de jeunes ne reçoivent souvent pas le même niveau de soutien financier et d’encadrement que les clubs professionnels, ce qui peut les empêcher de se développer pleinement.

Enfin, les blessures peuvent également être une grande source de défi pour les jeunes footballeurs. De nombreux footballeurs connaissent des blessures graves qui mettent fin prématurément à leur carrière professionnelle, et ces blessures sont également une source de douleur psychologique et émotionnelle pour les joueurs.

Ces joueurs peuvent se sentir délaissés par la société et leur communauté. Leur famille, leurs amis et même leur entraîneur peuvent avoir placé de grandes attentes sur eux, et leur échec peut les faire se sentir décevant, les laissant sans soutien.

Il est important de se rappeler que le football n’est pas tout dans la vie et qu’il y a d’autres avenues pour réussir dans la vie. Les footballeurs qui ne parviennent pas à devenir professionnels peuvent toujours continuer à jouer pour le plaisir du jeu, rejoindre des équipes locales ou se concentrer sur leur carrière académique ou professionnelle.

En fin de compte, la persévérance, la passion et l’attitude sont des qualités importantes pour tous les footballeurs, qu’ils soient professionnels ou pas. C’est l’attitude positive et la détermination à poursuivre ses rêves qui peut aider les joueurs à surmonter la déception et aller de l’avant. Avec le temps, ils pourront réaliser d’autres objectifs importants dans leur vie. Le football n’est pas que paillettes, grands stades et gloire. C’est la réalité de ce monde sans pitié.

Propulsé sur le devant de la scène dès son plus jeune âge par le reportage de Canal + “ A la Clairefontaine “ , le footballeur professionnel Ricardo Faty connaît bien ce parcours du combattant. Issu de la génération 1986 aux côtés des Ben Arfa, Abou Diaby ou Geoffrey Jourdren. Avec ses camarades de jeu de l’époque, il a créé l’association Génération 86, une initiative totalement bénévole et guidé par les valeurs profondes qui unissent ces gars, qui pour certains ont réussi, qui pour d’autres ont emprunté des chemins bien différents. Mais unis à jamais par leur parcours commun, ils ont décidé de faire profiter les jeunes footballeurs en herbe de leur expérience.

Il aurait été facile de faire un papier sur cette belle initiative, avec tous les poncifs habituels. Mais qui de mieux que Ricardo Faty pour nous parler de ce sujet. Sébastien Vidal est parti à la rencontre du natif de Villeneuve Saint Georges. Pour un échange sans langue de bois, autour de la passion de ce sport et de ce beau projet.

Bonjour Ricardo, peux-tu te présenter pour nos plus jeunes lecteurs qui ne te connaissent pas forcément ?

Bien sûr, je suis footballeur professionnel. J’ai 36 ans, j’ai fait ma préformation à l’INF Clairefontaine. Ensuite je suis parti au centre de formation de Strasbourg avec Kevin Gameiro. Très tôt, à l’aĝe de 20 ans je suis parti à l’AS Roma, j’ai fait le grand saut à l’étranger. J’ai joué deux saisons là-bas. Avec des prêts à Leverkusen et Nantes. Chez les canaris j’ai joué la Ligue 2 et la Ligue 1. J’ai beaucoup bougé dans toute l’Europe. En Grèce, à Salonique, en Belgique ou en Turquie où j’ai passé cinq saisons. j’ai la chance d’avoir eu une longue carrière.

J’ai joué quasiment 18 ans au haut niveau et j’ai fini ma carrière à la Regina en Série B. Maintenant je suis revenu vers chez moi, je suis en transition, et je joue à Chartres qui évolue en National 2. 

On l’a dit, tu es issu de la fameuse génération 86. Une belle promotion ou près de la moitié des aspirants footballeurs ont fait carrière. Les gens non initiés peuvent penser que c’est la norme, mais il faut dire que c’est exceptionnel en termes de réussite.

C’est vrai que nous avons eu une très belle promotion mais il faut expliquer qu’il y a plusieurs paramètres pour expliquer cette réussite. Il faut bien sûr une part de chance, forcément que le talent entre en ligne de compte mais à ce niveau-là tout le monde a des qualités. Mais c’est surtout la suite qui est importante quand vers l’âge de 16 ans tu rentres en centre de formation, l’environnement peut tout changer.

Je vais te donner un exemple. Moi j’ai choisi de partir à Strasbourg avec Habib Belaïd. Tous les deux nous sommes sortis pro car nous avons bien réfléchi au choix du centre de formation. A Strasbourg, on avait senti un vrai projet, une vraie considération pour les jeunes. Je pense que l’expérience du reportage de Canal + m’a servi , pour d’autres je pense que c’est l’inverse. Ceux qui ont été en formation au PSG ou à Monaco par exemple. Il y avait plus de pression pour certains après le reportage, des attentes élevées.

Il faut que les planètes s’alignent en fait. Il faut de la chance, un club avec une politique sportive pour les jeunes sans oublier le mental. Il faut être fort, avoir une mentalité à toute épreuve.

Comme tu l’as dit, que la moitié de notre promotion soit devenue professionnelle, c’est un score très élevé. C’est le bon travail de Claude Dusseau qu’il faut mettre en lumière.

Le taux de réussite est faible dans notre sport. Les places sont chères. Les critères de sélection sont très élevés.

Clairefontaine n’est qu’un début en vrai. On ne sait jamais quel avenir va avoir un gamin de 13 ans, même à ce niveau là. Le plus dur est encore devant et le centre de formation filtre encore plus, la concurrence est partout.

Dans une promotion normale à l’INF , on dit que si 4 joueurs (sur les 24) sortent professionnels, c’est une année réussie.

J’ai le sentiment quand même qu’à ton époque la donne chez les aspirants footballeurs était différente. Aujourd’hui toute l’énergie de ces jeunes n’est plus concentrée sur le football mais sur leurs images, l’argent ou les réseaux sociaux ? 

C’est une question de génération et d’évolution. A mon époque il n’y avait pas toute cette technologie, téléphone portable ou réseau sociaux. Pour ma part, je voulais être pro parce que j’étais passionné par le football. Je ne savais même pas que les joueurs étaient payés, je voulais simplement pratiquer ma passion. Prendre du plaisir et accomplir mes rêves. Mais tu as raison sur la période actuelle. Avec l’avènement d’internet, l’accès à toutes les infos, les réseaux, il y a un côté bling bling qui se dégage. Le jeune joueur qui veut être pro peut être, parfois,motivé par les mauvaises raisons.

Par l’appât du gain, la belle voiture…. Cela peut conduire à des choses néfastes. C’est ce qui fait que de nos jours le football prend une tournure différente, nous nous étions exclusivement tournés vers le football, le jeu. Il ne faut pas faire une généralité non plus, il y a encore des jeunes aspirants qui sont guidés par le plaisir du ballon.

L’entourage des jeunes n’est plus le même non plus, on a maintenant des gens qui veulent tous leur part du gâteau et qui se comportent de manière dangereuse pour ces gamins ?

Par moment les jeunes et leur entourage ne sont pas guidés par les bonnes motivations. Ça joue sur des carrières bien sûr. Tu sais au plus haut niveau, tu ne peux pas être drivé par autre chose que la passion et le plaisir de jouer. Sinon tôt ou tard tu ne pourras pas franchir de palier et exceller. Prends le cas de Cristiano Ronaldo, le meilleur joueur du monde. Il a beau avoir tout gagné, être immensément riche, tu sens quand même qu’il est animé par le plaisir de jouer au football. Les mauvais choix ou le mauvais entourage font passer pleins de jeunes à côté d’une carrière.

Moi je sais que tout était clair il y a 20 ans. Les parents étaient là pour materner, les agents pour gérer la carrière etc. Chacun était à sa place.

Les sommes astronomiques du foot moderne font que comme tu le dis, tout le monde veut sa part. Tout le monde pense pouvoir faire le travail de gestion de carrière. Ça amène des incompréhensions, quand tu vois le nombre de familles qui s’improvise agent ou manager. C’est un vrai travail et c’est le joueur qui paye les pots cassés.

C’est aussi pour cela que l’association génération 86 a été créée, pour promouvoir certaines valeurs, qui nous ont forgé il y a des années et qui se perdent un peu.

Il faut parfois un retour aux valeurs morales et universelles. Nous voulons transmettre aux jeunes, aux éducateurs, aux parents. Nous venons avec un message de bienveillance.

Génération 86, parlons-en. Tu as monté ce projet avec d’autres membres de ta génération 86. Comment est née cette idée ?

Depuis l’INF Clairefontaine, le groupe a tissé des liens très forts. Pour la majorité nous sommes restés en contact. Même avec ceux qui n’ont pas percé dans le football. Et un jour pendant le Covid, nous avons eu une discussion au sujet des jeunes ou des parents qui venaient nous solliciter pour avoir des conseils sur comment faire les bons choix dans ce milieu. Notre expérience était précieuse pour ces gens là. On s’est posé la question de fonder une association ensemble. Pour passer du temps ensemble et aider les clubs, les jeunes par notre cursus, nos expériences diverses et notre connaissance du monde professionnel. Sans jamais donner de leçon à personne. On est là pour faire de la prévention, sensibiliser. Expliquer qu’il y a aussi une vie pour ceux qui ne vont pas réussir à faire carrière. Etre franc avec eux sur les difficultés de ce métier et ouvrir d’autres perspectives d’avenir.

Avec cette association vous avez un rôle qu’on pourrait qualifier de “ grand frère “ avec ces gamins. C’est ton vécu qui fait que tu sais qu’il est important d’avoir ce type de personne à ses côtés ?

Moi j’ai eu la chance d’avoir mon grand frère (Jacques Faty ex joueur international). Moi je veux juste mettre à profit mon expérience. J’ai joué dans beaucoup de pays, j’ai évolué dans de nombreux clubs. A cette époque déjà, je conseillais les plus jeunes de l’équipe, quand je voyais des choses qui pouvaient nuire à leur carrière. Pour moi c’est naturel de discuter et sensibiliser. C’est pour ça que je n’ai pas hésité quand le projet Génération 86 a pris forme.

Dans l’association, la plupart ont cette envie de partage. A notre age , on a conscience de la chance que l’on a eu et des difficultés que nous avons dû affronter. Partir du jeûne, la concurrence, la compétition, le jugement des autres…. On donne de notre temps avec grand plaisir pour faire bénéficier les acteurs du monde du foot de notre expérience.

Vous faites tout ça de manière bénévole, un projet presque à contre-courant, dans un football qui ne vit que par les paillettes et l’argent. Un football où personne n’est désintéressé ?

J’imagine oui et non. Nous n’avons aucune ambition lucrative. Notre seule motivation, c’est la bonne humeur et le partage. On met toujours en avant le côté lucratif du football mais il ne faut pas oublier qu’il y aussi des projets et des associations qui sont bénévoles. On en parle beaucoup moins, c’est surtout ça. Les gens de l’ombre sont importants. Nous non plus nous ne sommes pas forcément mis en lumière, le plus important c’est le message que l’on délivre. Nos valeurs sont vraies.

Les partenaires sont importants dans ce type de projet. Je remercie d’ailleurs Kipsta qui nous offre du matériel que l’on peut laisser aux clubs et aux jeunes. C’est des équipements qui sont bénéfiques quand on fait des journées. Nous n’avons que des bons retours. On veut compter sans devenir une très grosse association.

Pour l’instant nous faisons tout nous même, c’est moi le CM des pages sur les réseaux sociaux. Tout n’est qu’une question de moyen. On veut rester indépendant mais pour grossir il faudra discuter avec d’autres partenaires comme la FFF. On verra de quoi est fait le futur et les aides extérieures qui peuvent nous aider. C’est un cheminement et un compromis à trouver.

Une chose est certaine, il faut que nous progressions sur la visibilité, que notre action soit connue par plus de gens. Ça commence à bien fonctionner, nous avons de plus en plus de demandes. Après il faut réussir à bien coordonner les agendas des uns et des autres. 

La question naturelle qui se pose est de savoir si toi dans un futur proche, tu ambitionnes de transmettre à ces jeunes, dans un rôle d’éducateur, entraîneur, agent ou dirigeant de club ?

Totalement, c’est aussi pour cela que je suis revenu à Chartres. Je suis en train d’entamer ma nouvelle vie. Je vais passer mon Brevet Fédéral d’État (diplôme national permettant à son titulaire d’avoir la qualification d’éducateur / entraîneur), j’ai déjà un diplôme en management avec l’université du sport de Lausanne. Je me projette dans le coaching et le management de jeunes joueurs. C’est mon projet oui. C’est la suite naturelle de ma carrière. Depuis l’âge de 13 ans, j’ai emmagasiné beaucoup de choses, je veux en faire mon activité principale mais je ne sais pas encore où. Je discute des opportunités ici à Chartres, j’aimerais aussi intégrer l’organigramme de Strasbourg, mon club formateur. ce serait une belle histoire.

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