La diversité du football demeure exceptionnelle. A l’heure où l’on s’étripe pour une place ou deux en quart de finale du mondial de rugby, le foot offre une diversité bien plus appréciable. Ainsi, le nouveau leader de Ligue 1 se nomme Brest, un peu le Portugal du rugby pour prolonger la comparaison. Même si ce n’est qu’une question de patience puisque le PSG a déjà anéanti l’OM, l’un de ses rares opposants…
Un week-end de PSG-OM, il n’est guère aisé d’exister en Ligue 1. Fait rarissime, deux clubs ont néanmoins réussi à s’offrir un billet sous les projecteurs. Et ce pour deux semaines ! Car non seulement Brest et Nice ont brillé et pris les deux premières places à Monaco. Mais ils s’opposent ce week-end sur la Côte d’Azur et joueront donc pour la place de leader devant, probablement, le PSG, « en exhibition » à Clermont.
Tous les épisodes de Ligue 1 ne se valent pas. Mais il faut reconnaître que le dernier week-end a été particulièrement exaltant. Déjà, BrestLyon était l’opposition idéale pour voir si Brest avait bien l’épaisseur grandement aperçue depuis le départ du championnat. Avec un zeste de dramaturgie en plus, de par la situation de l’OL. De plus, le nouvel entraîneur lyonnais Fabio Grosso débutait en fanfare en plaçant sur le banc. Rayan Cherki.
À vrai dire, un choix qui n’a rien d’absurde si vous voulez jouer en 4-3-3 et si vous considérez qu’avec Cherki en 10, vous risquez d’être chahuté au milieu. Mais le premier problème est bien qu’avec trois travailleurs au milieu, l’OL s’est fait littéralement détruire par l’envie bretonne. Le second étant qu’avec deux ailiers fantomatiques (les jeunes recrues Moreira et Nuamah), on se dit que Rayan Cherki aurait forcément dû trouver une place et aurait bien aidé l’OL à toucher un peu le ballon. Cela dit, l’entrée de Cherki en fin de match (à la place de Lacazette !) rangera ce match définitivement parmi ceux où l’on peut avoir eu tous les jugements définitifs durant le match pour finalement se dire que Grosso aurait probablement pu faire tous les choix possibles sans arriver à grand-chose de cohérent. Lyon, à nouveau relégable, en est déjà à ce stade d’impuissance caractérisée.
En face, Brest a, comme toujours, mis du rythme et séduit. La transformation de cette équipe au potentiel unanimement considéré comme limité (avec la 16e masse salariale de Ligue 1, comment en serait-il autrement ?) est proprement incroyable. La voilà leader de Ligue 1 après six journées. Et un succès à Nice permettrait d’allonger le conte de fée. Eric Roy n’avait peut-être pas entraîné depuis plus de dix ans quand il a repris l’équipe. Mais il n’avait visiblement pas perdu la main…
Si Brest a pris la tête, c’est aussi parce que Nice a été l’autre trouble-fête de ce début de championnat et en allant s’imposer à Monaco. Bien sûr, on se saurait comparer l’OGCN avec le Stade Brestois. Ni en termes de moyens, perspective ou de jeu. Nice, et son actionnaire Ineos, représente l’un des clubs d’avenir de la Ligue 1. Le début de saison était plutôt raide et ressemblait à l’anonymat de la dernière saison. Mais deux victoires consécutives au Parc des Princes et au Stade Louis II changent la donne. C’est vrai, les Aiglons avaient déjà marqué leur territoire par ce type de performances défensives l’an dernier (seule équipe à gagner à Lens au pays des « chicoteurs » !). Mais, cette fois, Nice monte en gamme. Gagner au Parc (3- 2) était déjà assez inouï. Mais y ajouter une victoire à Monaco dans la foulée, chapeau ! Certes, les Niçois peuvent remercier Marcin Bulka, leur gardien polonais ayant stoppé deux penalties de l’Américano-Nigérian Folarin Balogun. Mais le nouveau coach italien Francesco Farioli est, aussi, déjà surveillé de près. La semaine précédente, il avait déjà dominé Luis Enrique avec Bordeaux. A Monaco, il a bénéficié de plus de réussite. Alors que l’Espagnol du PSG a redressé totalement la barre face à l’OM. En retour de semaine internationale, il avait présenté un 4-3-3 sans grande personnalité face aux Niçois. Avec plusieurs absences notables.
Si tout le monde a souligné à raison la performance collective de ce nouveau PSG dans le « classique », n’oublions jamais l’importance des individualités dans ces équipes de très haut niveau. Au complet, le PSG s’évitait Danilo ou Soler qui évoluaient contre Nice. Et Luis Enrique pouvait se permettre d’innover avec tous ses titulaires. Son 4-4-2 s’est finalement révélé être davantage un 3-3-4, tant Hakimi pèse sur le schéma. La forme étincelante du Marocain (déjà 3 buts et une passe décisive) permet à la défense de glisser le plus souvent à trois avec Lucas Hernandez rentrant côté gauche. D’où la titularisation surprise (la première de la saison) de Barcola.
En effet, il était peu envisageable de mettre Kylian Mbappé sur un large territoire côté gauche, avec la mission subsidiaire d’empêcher Clauss de monter. Barcola occupa donc ce côté gauche et compléta une incroyable attaque à quatre têtes. Dembele occupant le flanc droit, et les puissants Mbappé et Kolo Muani doublant dans l’axe. Paradoxalement, ce fut sans doute la partie la moins réussie du plan, les deux attaquants axiaux ayant du mal à s’exprimer. Mais la blessure de Mbappé fut sans doute un coup de pouce inattendu. Non que ce soit une bonne nouvelle pour le PSG. Mais, ponctuellement, Luis Enrique montra d’abord la force des convictions en le remplaçant par un vrai numéro 9, Gonçalo Ramos.
De fait, le coach espagnol pouvait remercier l’OM et son informe 5-3-2. Nice avait montré la voie en menaçant sans cesse le PSG en contre. Le tout nouveau Jacques Abardonado, peutêtre rétréci par un retour tardif d’Amsterdam, opta pour un schéma prudent qui fit les affaires du PSG. En mettant ses quatre flèches, Luis Enrique empêchait les latéraux marseillais de sortir (sauf une fois Clauss)… Et se permettait d’aller au duel au milieu avec deux seuls hommes, Ugarte et Zaïre-Emery. Sans oublier Hakimi qui perturbait un milieu marseillais déjà littéralement dépassé. Pour réussir plus haut, l’OM devra retrouver des jambes au milieu. Pour maintenir ce niveau, le PSG devra continuer à oser et tomber sur des adversaires déjà consentants. Je me souviens vous avoir entretenu ici même l’an dernier du 3-4-3 de Galtier à peu près à la même époque. En indiquant que Verratti et Vitinha auraient bien du mal à tenir le milieu dès que la route s’élèverait.
Galtier s’en était rendu compte lui-même en repassant en 4-3-3 pour le reste de la saison, abandonnant au passage toute ambition de surprendre et se rendant exclusivement dépendant de ses stars de devant. Après le 4-0 contre l’OM et la démonstration collective au milieu, il est impossible de penser de même aujourd’hui. Bien sûr, le volume de MessiNeymar-Verratti posait question. Mais c’est surtout l’état d’esprit de l’équipe, voire du club, qui ne permettait pas d’envisager de telles performances collectives, tout simplement. Il est encore tôt pour savoir si cet état d’esprit tiendra sur la durée. Mais on ne voit pas bien qui pourrait retenir le PSG en France, quand bien même, à nos frontières sud-est et ouest, Nice ou Brest sera sans doute leader dimanche soir. En ce sens, la blessure de Mbappé peut avoir fait plus de mal à ses rivaux français qu’au PSG lui-même. Voir le sens du but avéré de Ramos et les déboulés impressionnants à droite de Kolo Muani en deuxième période pour s’en convaincre…
En tout cas, le public du Parc prit un immense plaisir à voir un collectif, comme à Monaco et à Brest, s’imposer. C’est plutôt l’OM, perdu dans ses embrouilles, qui a mal au crâne avant d’aller à Monaco. Ayant à la fois pris 7 buts en deux matches, perdu la bataille des ailes et du milieu au Parc, il est probable que l’OM voudra s’inspirer de quelques recettes aperçues la semaine passée, mais dans l’équipe d’en face. Alors que beaucoup pensent qu’on ne peut gagner en 4-4-2 ou que le 3-5-2 est plus moderne, ce week-end montrera encore que l’état d’esprit fait bien plus que les schémas tactiques les plus ambitieux. Reste à savoir si ce sont Nice, Brest, Monaco ou Marseille qui le démontreront dans cette Ligue 1 revigorée.