Cette semaine la Palette à Doudouce s’arrête du côté de Saint-Denis, au Stade de France, pour la finale de Coupe de France qui oppose les Toulousains au Nantais. L’occasion pour Philippe Doucet de vous plonger dans l’événement.
Je n’en suis pas à faire un « teasing » pour vendre une finale de Coupe de France NantesToulouse, mais il est toujours bon de rappeler qu’il n’y a pas que deux clubs en France et que le reste a aussi une certaine valeur. Opportun rappel à quelques mois d’un appel d’offres des droits TV absolument vital pour une « Ligue 1 des talents » qui a encore perdu plus de 600 millions d’euros la saison dernière. Malgré les ventes de joueurs et des aides étatiques sur les charges. Alors, intéressons-nous à ce NantesToulouse en finale de Coupe de France. Personnellement, datant d’une époque où la finale de Coupe n’était pas systématiquement réservée aux grands Nantes, Monaco ou SaintEtienne, je n’ai aucun mal à me passionner pour cette finale. Je dirais même que j’avais accueilli la finale 2022, Nantes-Nice, avec bénédiction. C’était avant d’apprendre (il y a peu) que celleci avait été largement pourrie côté niçois par le ramadan…
Que le PSG accumule les conquêtes nationales pendant des années et fasse table rase sur la Coupe de France n’était que pure logique. Avec un tel écart de valeur, le « petit » n’avait que peu de chances, même sur 90 minutes. Et puis, le PSG s’est dispersé et s’est peut-être lassé autant que nous devant ce palmarès répétitif. Il vient donc de lâcher la Coupe deux années de suite. Chaque fois au cours d’un printemps rendu brouillon par une élimination en Ligue des Champions auquel, visiblement, le club ne s’habitue pas… Messi arrivera-t-il enfin à remporter la Coupe de France ? Suspense fou ! Bien sûr, le PSG n’a pas fait exprès de perdre à Marseille début février. Mais, force est de constater qu’il a mis une autre énergie en Ligue 1 pour écarter l’OM en fin du même mois. La seule absence de Mbappé en Coupe n’expliquant jamais tout. Et donc, voilà l’inattendu Nantes qui prend le relais du PSG en s’abonnant à la Coupe. C’est évidemment infiniment moins logique au vu de la 16e place des Bretons en Ligue 1 et des frayeurs que vit ce club pour la fin de saison. À ce titre, la fête de ce samedi sera de courte durée, quel que soit le résultat. Le déplacement à Brest le mercredi suivant pourrait signifier le retour du FC Nantes parmi les relégables. À cinq journées du terme. Chaud…
Mais cela ne doit pas faire oublier la fraîcheur nantaise 2022. Certes, il n’y avait rien eu d’enthousiasmant dans la victoire sur Nice en finale (1-0). Le tout sur un vague penalty «made in France». Vous savez, ce pays étrange où les arbitres voient des mains partout. Même à Münich en Ligue des Champions quand il s’agit de Mr.Turpin. Idem un an auparavant, lors de la finale de Coupe sous le sifflet de Stéphanie Frappart. Mais la fraîcheur nantaise, c’était voir un autre vainqueur que le PSG sur le podium. Et, bien plus, un vainqueur n’ayant plus rien gagné depuis 21 ans et retrouvant l’Europe comme un bain de jouvence absolu. Il ne faut pas bouder les plaisirs de fin de saison. Ils sont souvent un mélange de joie, mais aussi de soulagement après avoir espéré et cru si longtemps que cela atténue toutes les forces en jeu, même les bonheurs. Alors que là, Nantes ne venait de nulle part. Et ne l’a pas vraiment vu venir, puisqu’il fallait encore battre Monaco et Nice pour finir. Et que les séries de tirs au but auraient évidemment pu tourner différemment. Ce bonheur fou a donc fait du bien à la centenaire « Dame Coupe », comme le Stade Rennais avait pu déjà la contenter en 2019. Et c’est l’Europa League qui a ensuite bénéficié de la folie nantaise. Jusqu’à nous faire croire que le FCN pouvait venger une élimination en demifinale de la Ligue des Champions contre la Juve datant de 1996. Evidemment, la logique a repris ses droits et c’est bien la « Vieille Dame » qui est aujourd’hui en demi-finale de cette Coupe d’Europe. Mais la magie de la Coupe avait fait son effet et Nantes su nous transporter sur son petit nuage. La magie devrait aller encore plus loin cette année avec une finale révolutionnaire rassemblant les Nantais et l’étonnant TFC. Déjà, l’histoire du foot à Toulouse est plutôt complexe. Et l’enthousiasme pour la campagne de coupe toulousaine rappelle davantage les épopées rugby qu’autre chose. Les anciens parleront évidemment de la victoire de 1957 face à Angers (6-3), mais oublieront peut-être au passage qu’il ne s’agissait pas du même club. C’est, en effet, un autre Toulouse Football Club qui ramena la Coupe à la maison, auprès de la Garonne, au siècle dernier…
Mais que le nouvel US Toulouse (créé en 1970), devenu entre-temps le TFC, soit en finale est déjà un sacré événement. Malgré quelques bonnes périodes (Maradona éliminé au Stadium avec le Napoli…), le club toulousain n’avait jamais été aussi près d’un titre. Formidable pour un retour en Ligue 1, accompagné d’une 12e place et d’un jeu de qualité. Pour en profiter, il faut revenir au fameux but à Montpellier au terme d’une action collective de toute beauté partant de derrière
C’est aussi la marque de fabrique de l’équipe dirigée par Philippe Montanier. Rien de dogmatique, mais un football construit, intelligent, une manière de faire évoluer, progresser des joueurs recrutés « worldwide », selon la méthode datas qui plaît tant à l’investisseur américain Redbird. De fait, l’effectif du TFC nouveau rassemble 18 nationalités différentes. Du Chili à l’Australie, en passant par le Danemark, le Japon et le Maroc… Et Van der Boomen, Spierings, De Jaegere, Onaiwu, Aboukhlal ou Dallinga s’épanouissent au TFC pour offrir une qualité de jeu qui remplit le Stadium. Avec plus de 23.000 de moyenne, Toulouse n’avait pas vu cela depuis les dernières années européennes (2004/05)…
Bien sûr, l’originalité de cette finale (Nantes n’en a pas disputé tant que ça, avec 4 succès seulement…) ne garantit pas un spectacle de haute volée. Mais la curiosité est un ingrédient essentiel. Et il arrive ainsi que l’Europa League nous contente davantage que les affiches répétitives de la Ligue des Champions. Dans cet ordre d’idée, lors de la semaine dernière, l’AZ Alkmaar ou Séville ont peut-être offert plus d’émotions que le Real mécanique ou même un City en maîtrise au retour à Münich. Il est bon qu’à l’occasion d’une telle finale, le football nous rappelle à ses émotions premières, loin de la future Super-League. Comme il est salutaire de voir Nantais et Toulousain vibrer sans besoin d’être capable de rivaliser avec les grands de ce monde et aligner des effectifs en centaines de millions sur le terrain. Oui, vraiment, c’est un plaisir de voir «monter à Paris» ces supporters qui ne sont pas trop familiers du Stade de France. Comme il sera agréable de vivre ce match entre deux clubs aussi mal classés qu’en 2014, la dernière finale dans ce cas de figure. Il est vrai que le PSG a joué sept des huit finales suivantes…